Escarpe

Isabelle Rivals

Le texte dont était tiré "purotin", le mot du jour de la semaine dernière, évoquait à la suite desdits purotins des "escarpes" refoulés avec les premiers le long des remparts de la ville. Le mot escarpe a ici le sens de brigand, de bandit qui n'hésite pas à assassiner pour voler, et ne semble pas venir directement de l'escarpe des fortifications, mot plus ancien qui désigne le talus du rempart qui descend vers le fossé (tandis que la contrescarpe est le talus qui remonte du côté opposé, vers l'extérieur), mais plutôt être emprunté d'un argot méridional, où il a été tiré du verbe provençal escarpi "écharper". Ce qui nous ramène tout de même à un sens commun puisque qu'écharper c'est tailler avec un instrument tranchant, et que l'escarpe-talus a aussi probablement pour origine un gothique skarpô, de la famille de l'allemand scharf "tranchant", d'où aussi escarpé "en pente raide".

« Les mendiants, les prostituées et les grinches sont restés depuis le Moyen Age dans ce coin de ville, mais les étudiants semblent l’avoir pour jamais quitté. Ils ne franchissent guère maintenant le boulevard Saint-Germain et le boulevard Saint-Michel qui enserrent le labyrinthe des vieilles rues. À l’heure actuelle, le quartier Saint-Séverin, le seul, à Paris, qui conserve encore un peu de l’allure des anciens temps, s’effrite et se démolit chaque jour ; dans quelques années, il n’y aura plus trace des délicieuses masures qui l’encombrent. On nivellera d’amples routes, l’on abolira les tapis-francs, l’on refoulera le long des remparts les purotins et les escarpes ; une fois de plus, les moralistes s’imagineront qu’ils ont déblayé la misère et relégué le crime ; les hygiénistes clameront également les bienfaits des larges boulevards, des squares étriqués et des rues vastes ; l’on répétera sur tous les tons que Paris est assaini, et personne ne comprendra que ces changements ont rendu le séjour de la ville intolérable. » Extrait de La Bièvre, Les Gobelins, Saint-Séverin de Joris-Karl Huysmans (1901).